Les façades du centre Jean-Moulin accueillent une dizaine de photosprises le 28août 1944 et dans les jours qui ont suivi. Des documents forts, retravaillés et recadrés pour reconstituer l’ambiance à Bordeaux à l’heure de la Libération
«Ay ay ay», lâche une touriste hispanophone en voyant une photo de navires sabordés par les Allemands avant qu’ils ne quittent le port de Bordeaux le 27août 1944. Cette image fait partie de la dizaine exposée sur les façades du centre Jean-Moulin pour le 80e anniversaire de la Libération de la ville, le 28août.
Une dizaine de photos seulement, parce que cela correspond au nombre de fenêtres du musée, sur lesquels elles sont exposées, mais aussi parce que le centre Jean-Moulin n’a pas souhaité saturer le regard des passants. «On a voulu que cette exposition soit visible par tout le monde, explique le directeur Romain Wenz. Elle doit être complémentaire de celle qu’on inaugurera en mai 2025 au musée d’Aquitaine, sur l’après-guerre, et qui sera beaucoup plus documentée.»
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Série (8/8). Cet été, «Sud Ouest» revisite tous les lieux de Bordeaux où s’est joué un acte de la Seconde guerre mondiale, avant la Libération de la ville, le 28août 1944, qui s’est passée relativement pacifiquement. Pourtant 3000personnes auraient pu être tuées si les Allemands avaient détruit le port et le pont de pierre
Ici, à l’angle de la rue Vital-Carles et à deux pas de la place Pey-Berland, il s’agit donc de montrer des temps forts de ce 28août 1944, en s’appuyant sur les fonds détenus par le centre Jean-Moulin et par les Archives de Bordeaux Métropole. L’idée a été de faire en sorte qu’on puisse le plus possible identifier les lieux où les vues ont été prises, mais aussi de beaucoup retravailler les photos, en grossissant notamment les éléments les plus parlants.
La vue de la Garonne pleine d’épaves offre l’occasion de reparler du coup de force de Heinz Stahlschmidt, qui a détruit seul le bunker de la rue Raze et qui a permis d’éviter que le pont de pierre et les quais soient détruits. Une photo de soldats allemands quittant Bordeaux à vélo rappelle que la plupart étaient des marins, qui ne pouvaient plus rentrer chez eux en bateau.
«La visite de De Gaulle avait un double objectif: montrer que la République était de retour et rappeler que la guerre n’était pas finie»
Une image rare montre la Grosse Cloche sonnant pour célébrer la Libération de Bordeaux. Dont les responsables du centre Jean-Moulin ne cachent pas non plus les heures sombres. Une photo montre une foule ayant accouru en masse pour assister à la tonte de femmes. Un panneau sardonique «Salon de coiffure pour dames» est posé sur les lieux de la scène… «On ne sait pas précisément combien ont ainsi été tondues mais elles étaient plusieurs dizaines, évalue Romain Wenz. On sait en revanche qu’il y a eu 146 exécutés dans toute la Gironde.»
D’où l’importance de la venue du général De Gaulle, le 17septembre 1944, que l’on voit accompagné du jeune général Delmas. À l’époque, celui-ci n’avait pas encore ajouté son pseudonyme de résistant de Chaban à son nom de famille. «La visite de De Gaulle avait un double objectif: montrer que la République était de retour, que c’était dans le cadre de ses institutions que la justice devait être rendue, et rappeler que la guerre n’était pas finie, que les FFI devaient intégrer l’armée régulière.»
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De même que «La Petite Gironde» laisse à la place à «Sud Ouest», les journaux français d’avant-guerre qui avaient continué de paraître sous l’Occupation sont balayés par les ordonnances sur la presse de 1944
Le long de la rue Vital-Carles, enfin, l’accrochage est conçu pour être compréhensible en quelques secondes par les gens qui passent devant en tram. Ici, les photos sont centrées sur les figures humaines: des prisonniers allemands gardés par des résistants, une foule marchant vers la gare Saint-Jean en agitant des drapeaux français et américains bricolés le jour même, une ronde rue Sainte-Catherine autour d’enseignes vichystes en train de brûler. Tout cela est à voir jusqu’à la fin de l’année 2024. «Et peut-être plus tard si les panneaux tiennent…»
